Test World Of WarCraft : Mists Of Pandaria (PC) : 6/10 sur JeuxVideo.fr

Plus que jamais depuis sa sortie en 2004, World Of WarCraft a fort � faire pour convaincre qu'il a su rester dans le coup. Lest� par un game design vieillissant, le MMO de Blizzard doit maintenant faire face � la concurrence f�roce du fringant Guild Wars 2, � la progression autrement plus fluide et dynamique et, surtout, sans abonnement. La contre-attaque de Blizzard n'a pas tard�, sous la forme de l'extension Mists Of Pandaria, forte d'une nouvelle race (les Pandarens), d'une nouvelle classe (le Moine) et d'un continent in�dit, librement inspir� de la Chine traditionnelle. Suffisant pour remotiver son joueur ? Rien n'est moins s�r : � plusieurs �gards, le dernier jeu de Blizzard frappe par son manque d'ampleur et se profile comme la plus d�cevante des extensions de World Of WarCraft.



Pour les joueurs de niveau 85, l'entr�e dans Mists Of Pandaria se joue sur fond de guerre entre la Horde et l'Alliance : un nouveau continent - la Pandarie - vient d'�tre d�couvert et devient l'objet de toutes les convoitises ainsi que le front d'une guerre sans merci. On s'imagine d'abord que la progression racontera l'histoire de ce conflit renouvel� ; il n'en est rien. Le joueur fait vite la rencontre du peuple Pandaren, un moment charni�re qui fait basculer le r�cit vers une lutte anodine contre les diverses menaces locales : soit une grosse occasion manqu�e d'exploiter le potentiel �pique de l'amorce narrative. De la confrontation entre les factions d'Azeroth et les Pandarens, les qu�tes ne tirent rien de consistant : la piste de la � colonisation ï¿½ sauvage est vite abandonn�e au profit d'une histoire ultra lisse, sur fond de spiritualit� light.

Par exemple, le r�cit de l��l�vation � spirituelle ï¿½ du joueur sous la tutelle des ma�tres moines locaux se r�duit � de courtes qu�tes st�r�otyp�es, sans aucune profondeur narrative ni invention ludique ; le reste du temps, on se verra proposer de sauver des villageois de la menace d'une faune locale ou de tribus ennemies (ici des Singes, l� des Mogus, etc.), pour autant de qu�tes au souffle court.

S'il ne faut pas attendre d'un MMO qu'il fasse de son histoire une priorit�, les pr�c�dentes extensions b�n�ficiaient au moins d'un fil rouge - le cataclysme d�chirant Azeroth, la guerre contre le Roi Liche - source d'un frisson �pique occasionnel qui fait ici cruellement d�faut. L'�clatement du r�cit en petites histoires sans cons�quences font de Pandaria une extension aux enjeux quasi inexistants, alors m�me que ses th�mes - d�couverte d'une nouvelle civilisation, spiritualit� et mysticisme - semblaient prometteurs : une occasion manqu�e qui touche jusqu'au design des zones elle-m�me, globalement d�cevantes.

Bas�e sur le th�me de la Chine traditionnelle, les r�gions du nouveau continent soufflent le chaud et le froid. Les zones les plus r�ussies s'inspirent avec go�t de l'esth�tique asiatique, comme le sommet Kun-Lai, belle avanc�e montagneuse � himalayenne ï¿½ sertie de temples et conif�res suspendus au vide. La for�t de Jade, aux saillies rocheuses verdoyantes macul�es de cascades et de lacs est, elle, aussi enchanteresse que d'autres r�gions sont rat�es : des zones comme les �tendues sauvages de Krasarang rel�vent du b�clage artistique pur et simple, ternissant la coh�rence visuelle de l'ensemble. Soyons honn�te : les zones de qualit� fluctuante sont depuis toujours une constante dans World Of WarCraft ; mais elles trouvent ici une r�sonance particuli�re avec l'histoire en patchwork, aux m�me airs de bricolage sans inspiration.

De mani�re g�n�rale, les nouvelles r�gions peinent � surprendre et � distiller leur � exotisme ï¿½, la faute � un level-design archi-classique qui n'invente aucune topographie nouvelle. Autre motif de d�ception, les zones sont relativement petites et font vite se sentir � l'�troit : impossible de se perdre dans la majest� d'un d�cor de montagne ou l'�tendue d'une vaste plaine. Doit-on y voir le signe que le v�tuste moteur de WoW atteint ses limites ? Pas forcement puisqu'� technique �gale, le continent du Norfendre (extension Wrath Of The Lich King) accouchait d'environnements nettement mieux construits. Du reste, mis � part l'am�lioration du rendu de l'eau et de la lumi�re dont profitent certains point de vue, le retard technique accus� par ce Mists Of Pandaria ne l'aide pas � se relever.



Si l'exploration de Pandarie laisse un arri�re-go�t amer, le gameplay en lui-m�me n'en demeure pas moins solide, une qualit� pas d�mentie par le moine, nouvelle classe de cette extension. � l'image du druide ou du paladin, elle offre le choix entre trois sp�cialisations - tank, DPS m�l�e, soigneur - sur fond de � kung fu ï¿½ et de magie. Dans sa branche DPS, le moine b�n�ficie d'une nouvelle jauge de Chi : remplie avec le coup � de base ï¿½, elle permet ensuite d'exploiter les coups sp�ciaux lors de furieux combos � main nue.

Tout aussi int�ressant � jouer, le moine soigneur adopte une approche bas�e sur le soin de proximit�, plut�t que sur le sort cibl� : il faudra par exemple rester au contact du boss pour g�rer la sant� d'un tank lors d'un raid. Ce nouvel angle rafraichissant vaut �galement pour le moine tank : adepte de la � boxe de l'homme ivre ï¿½, ce dernier a recourt � divers breuvages alcoolis�s qui lui conf�rent buffs courts et autres options de reprises d'aggro.

Toutes ces branches partagent en outre une m�me base de coups en m�l�e figur�s par des animations soign�es, pour un ressenti satisfaisant en combat : une vraie r�ussite, que les joueurs pourront pratiquer en montant un Pandaren, sympathique nouvelle race mi-homme, mi-panda berc�e de spiritualisme, de discipline monacale et d'alcool fort - rappelons qu'ils pourront choisir au terme des leur zone de d�part (une �le tortue) de rallier l'Alliance ou la Horde au choix, une premi�re dans le MMO de Blizzard.

Autre nouveaut� majeure de cette extension, l'arbre des talents est remplac� par un nouveau syst�me rappelant celui de Diablo 3. Plus besoin de rendre visite � l'instructeur � chaque level up, le joueur acc�dera tous les quinze niveaux � un nouveau seuil de talents et devra en choisir un parmi les trois propos�s. Si ce nouveau syst�me clarifie les options de jeu, les joueurs �pris de theory crafting n'y perdront pas forc�ment au change : la notion de choix reste pr�pond�rante et les combinaisons, nombreuses. � l'�poque de l'arbre des talents, ce choix consistait parfois trop � �viter les comp�tences inutiles. Ce nouveau syst�me offre au contraire de tailler son style de jeu selon sa pr�f�rence.

Si simplification il y a, elle concerne plut�t la difficult� : outre la progression du niveau 85 au 90, pli�e en une cinquantaine d'heure, ce cr�do de l'accessibilit� s'applique aussi aux instances (4 en normal, 9 en h�ro�que) pour la plupart d�nu�es de challenge v�ritable. Cette difficult� revue � la baisse �mane d'une volont� avou�e de ne pas frustrer la majorit� des joueurs ; mais elle est aussi la cons�quence de boss plus routiniers que jamais : avares en situations in�dites et globalement peu spectaculaires, ces derniers font m�me regretter ceux de l'�poque Cataclysme (pr� nerf), capable de d�rouler quelques pattern m�morables. Il faut attendre les raids (cinq au total) et le mode d�fi pour se piquer d'un challenge digne de ce nom ; au sujet de ce dernier, rappelons qu'il propose de terminer une instance difficile en un temps limit�, avec pour contrainte suppl�mentaire un �quipement pr�-d�fini. Des m�dailles de bronze, d'argent et d'or gratifieront alors les meilleurs performances, avec des r�compenses prestigieuses � la clef (montures et set d'armures).

Entre les maigres enjeux sc�naristiques, les zones en demi-teinte et la difficult� revue � la baisse, que reste-t-il � Mists Of Pandaria ? Si la progression jusqu'au 90 se vit parfois comme une corv�e (qu�tes de facteurs et g�nocides de bestioles � r�p�tition), le niveau maximal s'ouvre sur pl�thore de qu�tes journali�res et r�putations � monter : une �quation addictive � l'efficacit� m�canique �prouv�e, quand bien m�me ce contenu se montre plus bourratif que r�ellement novateur. � leur meilleur, les qu�tes journali�res se r�v�leront parfois sympathiques : l'une d'entre elles propose par exemple de jouer les fermiers - du labourage d'un champs � la r�colte des graines - quand une autre demande de nourrir un b�b� dragon jusqu'� l'�ge adulte.

Nouveaut� du cru, le mode sc�nario propose une s�rie de sept �v�nements en zones instanci�es : on en fera le tour assez vite, mais ils offrent tout de m�me une distraction ludique au farming quotidien. Outre les deux nouveaux champs de bataille et la nouvelle ar�ne pour le versant PvP, on appr�cie �galement l'id�e du march� noir, aliment� par Blizzard en objets rares (armures et mascottes introuvables) sur le mode de l'ench�re. L'ajout le moins heureux reste le combat de mascottes au tour par tour (fa�on RPG japonais), qui s'av�re extr�mement r�p�titif, strat�giquement limit� et finalement peu gratifiant - les mascottes restent des mascottes, ni tr�s jolies, ni tr�s attachantes.

Tout bien consid�r�, le haut niveau nous a sembl� remplir son contrat minimum et devrait garantir aux joueurs les plus voraces de quoi s'occuper sur la dur�e. Pour autant, la progression en elle-m�me n'est pas un pur calvaire, et profite de quelques embellies qui dessinent en creux ce que Pandaria aurait pu �tre : dans la r�gion de la Vall�e des Quatre-Vents, le jeu semble enfin assumer l'abandon de son angle �pique au profit d'une atmosph�re bucolique, entre villages et rizi�res. Le temps de quelques heures, la progression s'y mod�le sur le rythme de la quotidiennet� paysanne, aussi prosa�que que rafraichissante, car s�immis�ant au plus pr�s de la vie et culture Pandarens : Mists Of Pandaria y gagne paradoxalement certains de ses meilleurs moments, jamais meilleur que lorsqu'il tourne r�solument le dos � ses pr�tentions �piques pour plonger dans la consistance de son monde.

D�cevante sur le plan de ses maigres enjeux narratifs comme de ses nouvelles zones, in�gales, l'extension Mists of Pandaria aligne une progression sans invention ludique majeure jusqu'au niveau 90. Beaucoup trop routinier, le leveling ouvre certes sur un contenu � haut niveau fourmillant de petites activit�s sympathiques - pl�thore de qu�tes journali�res, nouveau mode sc�nario engageant. Mais ces derni�res, instances comprises, se r�v�lent globalement tr�s faciles, et les joueurs hardcore devront attendre les raids et instances en mode d�fi pour renouer avec le challenge. Si la classe moine, r�ussie, motivera peut-�tre � relancer un personnage, reste cette impression que World Of WarCraft se retrouve vid� d'une partie de sa substance, le souffle court : il n'est pas dit qu'une telle extension, d�nu�e de mordant et de suppl�ment d'�me, sache conjurer la lassitude de ses joueurs tr�s longtemps.

NB : Le test a �t� r�alis� � partir de la version b�ta (patch 5.0.4) et sera mis � jour en cas de modification notable sur la version finale.
Configuration du PC de test : Processeur i7 2630 QM, Carte Graphique Radeon HD 6900M, 6 Go de M�moire Vive